Estimer la valeur d’un terrain pour construction d’un immeuble en PPE

Une image d’une grue avec un morceau de papier attaché.

Déterminer le bon prix d’une surface de terrain constructible peut sembler complexe si l’on ne maîtrise pas bien les rouages de l’estimation immobilière.

Pourtant, il n’y a rien de mystique.

Si vous savez faire des additions, soustractions, multiplications et divisions, vous connaissez suffisamment les mathématiques pour réaliser une estimation de la valeur d’un terrain sur lequel un immeuble peut être construit.


Table des matières

Et si en plus vous savez utiliser un tableur, vous allez voir que la méthode est vraiment simple et logique.

Mais encore faut-il comprendre les principes de base de l’estimation immobilière.

Voici le principe le plus important concernant la valeur d’un terrain :

La valeur d’un terrain constructible est directement proportionnelle à son potentiel de construction. Plus il est possible de construire densément sur un terrain, plus il vaudra cher.

Cet article décrit une méthode afin de déterminer le meilleur prix de vente possible pour un terrain constructible. L’étude de faisabilité décrite et expliquée sur base d’un exemple démontre la méthode étape par étape.

Cette méthode est connue sous au moins trois noms différents, à savoir : la méthode de compte à rebours, la méthode du promoteur ou encore la méthode de la valeur résiduelle.

Comment déterminer le potentiel de construction d’un terrain ?

Il y a différents paramètres à prendre en compte. Le tout premier est le type de zone du plan général d’affectation communal.

(Remarque : une nouvelle appellation existe, le PACom, pour plan d’affectation communal, composé d’un plan de zones et d’un règlement des constructions.)

Pour construire un immeuble d’habitation de 10 appartements par exemple, il faut se trouver en zone à moyenne densité ou en zone de village. D’autres types de zones permettent la construction ou la transformation d’un bâti existant en immeuble d’habitation.

Il y a ensuite les coefficients. Chaque commune du canton de Vaud dispose de son propre règlement ou police des constructions.

Les indices de base sont l’IOS ou indice d’occupation du sol, qui permet de déterminer la surface maximale qui sera occupée au sol par l’immeuble. Un autre coefficient est l’IUS ou indice d’utilisation du sol, qui détermine la surface de plancher qui peut être construite.

D’autres facteurs peuvent être utilisés pour déterminer la densité d’une construction sur un terrain, comme les distances aux limites, les alignements, le nombre de niveaux, la hauteur au faîte, etc.

Mais pour déterminer la valeur d’un terrain assez rapidement, il est possible de réaliser une première étude de faisabilité sur base des éléments de la police des constructions.

Le raisonnement est le suivant :

  1. Qu’est-ce que je peux construire sur cette parcelle ?
  2. À quel prix est-ce que je peux vendre ce qui sera construit ?
  3. Quels sont les coûts de développement, de construction et de commercialisation, la marge bénéficiaire et la prise de risque acceptable pour cette affaire ?

Le montant obtenu au point 2, déduction faite du montant total du point 3, donnera le prix du terrain.

Démonstration par l’exemple de la méthode d’estimation d’un terrain

Plutôt que de partir dans de grandes théories, je vous propose de vous démontrer par l’exemple une méthode qui sert à déterminer le prix auquel il est possible de vendre ou d’acheter un terrain sur lequel nous pourrions construire un immeuble d’appartements en PPE.

Contexte

Le terrain a une surface de 1’650 m². Il s’agit d’un rectangle de 50 mètres sur 33 mètres. Ce terrain est actuellement occupé en son milieu par une maison construite dans les années 1930, et dont la dernière rénovation date des années 1980.

Son propriétaire est décédé et ses héritiers envisagent de vendre le tout au meilleur prix du marché, en mandatant un courtier professionnel pour défendre leurs intérêts.

Nous sommes situés dans la région entre Lausanne et Morges, qui fait partie du PALM (Projet d’agglomération Lausanne-Morges).

La parcelle est maintenant située en zone à moyenne densité. La parcelle est relativement plate. Elle n’est ni particulièrement bien ni mal située.

Il n’y a pas de vue lac ni de nuisances particulières.

Un homme brandissant un iPad avec le titre estimé invulnérable.

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Règlement des constructions

Prenons une police des constructions qui nous impose les paramètres suivants pour cette zone :

IUS : 1

IOS : 0.3

La distance aux limites entre la construction et les parcelles voisines est de 6 mètres.

Hauteur au faîte : 12 mètres.

Toiture plate végétalisée.

Le dernier étage doit être en attique et sa taille peut être au maximum de 2 tiers de l’étage inférieur.

La construction optimale

L’indice d’utilisation du sol permet de déterminer la surface de plancher qui peut être construite au-dessus du niveau du sol. Pour une parcelle de 1’650 m² avec un indice de 1, cela signifie que l’on pourra construire un total de 1’650 m² de planchers.

L’indice d’occupation du sol détermine la surface au sol maximale qui peut être occupée par le bâtiment. Dans cet exemple, l’IOS est de 0.3, ce qui permet de construire un bâtiment d’une surface de 1’650 × 0.3 = 495 m².

Pour des raisons propres aux personnes qui établissent les règlements, il est très fréquent que les deux coefficients ne soient pas en accord l’un avec l’autre. Ce que je veux dire par là est que l’exploitation maximale de l’un ne permet pas l’exploitation maximale de l’autre.

Il faut donc choisir afin d’exploiter au mieux les coefficients en fonction de la forme de la parcelle et du type de construction qui s’y vendra le mieux.

Ici, nous savons que l’immeuble pourra mesurer 12 mètres de hauteur au maximum, ce qui permet de construire 4 niveaux au-dessus du sol. Les dalles mesurent 40 cm d’épaisseur, donc 4 dalles = 1.6 mètre.

Les hauteurs sous plafond seront de (12 – 1.6) / 4 = 2.6 mètres. C’est 20 cm de plus que le minimum. Ce qui donnera un peu plus de volume aux appartements.

Le facteur principal qui détermine le chiffre d’affaires de l’opération est le nombre de mètres carrés de surface habitable qui pourront être vendus. Les mètres carrés habitables dépendent des surfaces de planchers. Là où c’est possible, nous allons donc utiliser l’IUS à son maximum, c’est-à-dire 1’650 m² de planchers au-dessus du sol.

Dans ce cas, nous allons construire un rez avec des jardins, un 1er et un 2e étages de 450 m² chacun, et un dernier étage en attique de 300 m² et de grandes terrasses.

L’immeuble occupera alors 450 m² au sol. Soit une utilisation de l’IOS à 0.27 au lieu de 0.3, ce qui reste très rationnel.

Cependant, afin de pouvoir créer suffisamment de places de parc et de caves pour chaque appartement, le sous-sol fera 600 m², ce que le règlement communal permet.

Nous ne connaissons pas encore le nombre précis d’appartements à ce stade, mais nous savons empiriquement qu’il faudra prévoir une place de parc par 100 m² de surface de plancher, soit 17 places en l’occurrence.

Le solde du terrain non construit sera utilisé pour l’accès au parking souterrain, pour des places de parc visiteurs, pour des terrasses et jardins pour les appartements du rez, et pour un espace de jeux et un espace de verdure et BBQ à l’intention des copropriétaires.

Montant potentiel de vente

Chaque élément de l’équation doit être correctement évalué. Pour que les appartements produits se vendent, il faut qu’ils soient de bonne qualité, d’une typologie adéquate et proposés au bon prix de marché.

Le volume potentiel de vente, autrement dit le chiffre d’affaires de l’opération, s’estime en fonction des surfaces de vente. En l’occurrence, nous utiliserons les surfaces habitables des appartements vendus.

Pour calculer le volume des ventes, il faut déduire les surfaces de construction, c’est-à-dire la surface occupée par l’épaisseur des murs ainsi que les surfaces des parties communes, halls, escaliers, cages d’ascenseur.

Afin d’estimer les surfaces habitables, nous allons retirer 20% des surfaces de planchers.

Nous allons construire des appartements de très bonne qualité, avec des finitions standards qui correspondent à ce que la grande majorité des potentiels acheteurs de la région recherchent. Le prix de vente du mètre carré habitable est estimé à CHF 9’000 actuellement.

Remarque : il s’agit d’un exemple fictif, bien qu’il soit expliqué avec réalisme.

Voici un tableau avec les chiffres de ventes escomptés :

 Surface bruteSurface habitablePrix de venteTotal
Rez450 m²360 m²CHF 9’000/m²CHF 3’240’000
1er450 m²360 m²CHF 9’000/m²CHF 3’240’000
2e450 m²360 m²CHF 9’000/m²CHF 3’240’000
Attique300 m²240 m²CHF 9’000/m²CHF 2’160’000
Places de parc17 CHF 35’000/unitéCHF 595’000
Totaux   CHF 12’475’000

Coûts du projet

L’étape suivante consiste à établir les coûts de construction de cet immeuble. Ils se composent des frais préparatoires, des coûts de construction de l’immeuble et des aménagements extérieurs, des frais secondaires et des frais de développement, de pilotage et de commercialisation.

Voici le détail de chacun de ces postes.

Travaux préparatoires

La parcelle est relativement plane, mais elle comporte une maison en son centre. Cette maison doit être démolie. Elle contient de l’amiante, et des coûts supplémentaires doivent être considérés pour le traitement des déchets.

Les coûts de démolition et de travaux préparatoires sont estimés à CHF 150’000.-

Coûts de construction

Les coûts de construction s’évaluent en fonction des mètres cubes construits et de la qualité de la construction et des finitions. Il est donc nécessaire de déterminer quels seront les volumes de l’immeuble.

Les coûts de construction varient en fonction de la partie de l’immeuble. Les sous-sols comprenant les caves, les places de parc, les installations techniques, etc., coûtent moins cher à produire que les parties habitées.

La partie en attique coûte plus cher à produire, car elle inclut la toiture et des terrasses étanches. Voici une estimation des coûts de construction :

NiveauxVolumesCoûts de construction /m3Totaux
Rampe d’accès garage250 m³CHF 300CHF 75’000
Sous-sol2’250 m³CHF 450CHF 1’012’500
Rez1’350 m³CHF 950CHF 1’282’500
1er1’350 m³CHF 950CHF 1’282’500
2e1’350 m³CHF 950CHF 1’282’500
Attique900 m³CHF 1’000CHF 900’000
Totaux7’450 m³ CHF 5’835’000

Aménagements extérieurs

Les aménagements extérieurs comprennent tout ce qui est mis en place sur le terrain autre que l’emprise au sol de l’immeuble.

Nous avons déterminé que l’immeuble occupera une surface au sol de 450 m². Le terrain quant à lui mesure 1’650 m². Il y aura donc 1’650 – 450 = 1’250 m² de terrain à aménager.

Dans ce cas, les travaux d’aménagements consistent en :

  • chemin d’accès,
  • places de parc visiteurs,
  • pelouses,
  • allée vers la place de jeux,
  • place de jeux,
  • zone de verdure, détente, barbecue,
  • une clôture,
  • une haie vive,
  • des arbustes.

Le tout est estimé à CHF 150’000.-

Les frais secondaires

Il s’agit des frais tels que les taxes de raccordement aux eaux claires et aux eaux usées, les frais administratifs de permis de construire, etc.

De façon empirique, ces frais secondaires sont estimés à 7.5% des coûts de construction, soit CHF 437’625.-.

Les frais de développement, de pilotage, de commercialisation, etc.

Le développement d’un projet immobilier est complexe et nécessite de faire appel à un grand nombre de spécialistes afin de le mettre sur pied, de le mener à bien et de le commercialiser efficacement.

Il faut compter entre 15 à 20% pour l’ensemble de ces frais-là.

Tableau récapitulatif

Montant potentiel de venteCHF 12’475’000
Travaux préparatoires– CHF 150’000
Coûts de construction– CHF 5’835’000
Aménagements extérieurs– CHF 150’000
Frais secondaires– CHF 437’625
Développement, pilotage, commercialisation, etc.– CHF 1’871’250
Prix du terrainCHF 4’031’125

Ce tableau fait apparaître l’information principale recherchée, c’est-à-dire l’estimation de la valeur du terrain.

Dans cet exemple, en construisant la plus grande surface habitable possible en respect du règlement des constructions, et en vendant le mètre carré habitable au meilleur prix du marché tout en restant compétitif, il est possible de proposer au propriétaire de lui acheter ses 1’650 m² de terrain au prix de 4 millions de francs suisses, soit 2’425 francs du mètre carré.

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Ce qu’il faut retenir de cet article

L’estimation de la valeur d’un terrain passe par une étude de faisabilité du potentiel de construction sur ce terrain.

Lorsqu’on a établi la construction optimale, il faut ensuite chiffrer les coûts de production de cet immeuble.

Il convient ensuite de déterminer à combien l’on pourra vendre, de manière optimiste mais réaliste, les appartements produits.

Le montant total des ventes, diminué du total des coûts de production de l’immeuble, détermine le prix probable pour le terrain.

Ensuite, il convient encore pour le courtier négociateur de faire jouer une saine concurrence entre les potentiels acquéreurs, afin de vendre le terrain au meilleur prix du marché. 

Cet article fait partie de notre contenu dédié à l’estimation immobilière, n’hésitez pas à le consulter dans son ensemble.

Suite à la lecture de cet article, si vous avez la moindre question, n’hésitez pas à me la poser en laissant un commentaire.👇 
Je me ferai un plaisir de vous répondre !

Vincent Grognard

Directeur général
Courtier avec Brevet Fédéral

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Vincent Grognard Directeur
immobilier
Education: Union Suisse des Professionnels de l'Immobilier - USPI

Vincent Grognard, Directeur Général de Concretise, passionné et Courtier diplomé du Brevet Fédéral de Courtier en immeuble, façonne l'immobilier suisse depuis 2012. Doté d'une expérience commerciale depuis les années 90, Vincent excelle dans l'accompagnement de ses clients et dans la vulgarisation du monde de l'immobilier suisse. 

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3 réponses

  1. Bonjour,

    Auriez-vous un Excel d’un bilan promoteur complet avec formules afin d’évaluer plus rapidement la faisabilité de projets? Je peux éventuellement vous acheter ce fichier.

    Dans l’attente de votre retour, meilleures salutations,

    Arnaud

    1. Bonjour,
      Merci pour vos encouragements.

      Je pense que des solutions existent pour hypothéquer la maison.

      En règle générale, l’usufruitière peut utiliser la maison pour elle voire la louer et encaisser les loyers (les fruits). Les charges courantes telles que les frais d’entretiens, les intérêts de la dette hypothécaires, les taxes foncières sont à charge de l’usufruitière.

      Mais l’amortissement de la dette est à la charge du nu-propriétaire. Je suppose qu’une convention pourrait répartir les charges différemment. Une convention devrait être faite avec votre grand-mère prévoyant que vous pouvez hypothéquer la maison mais qu’en contre partie vous vous engagez à payer les intérêts de la dette ainsi que l’amortissement. Ce qui ne changera donc pas la situation financière de l’usufruitière. Ceci devra certainement se faire devant notaire et être inscrit au Registre foncier. Une fois cela fait en accord avec la banque qui va prêter l’argent, à partir du moment où vos revenus sont suffisant vous devriez être en mesure d’hypothéquer la maison.

      Se posera encore la question du rang de l’hypothèque. Idéalement, votre grand-mère devra être d’accord qu’en cas de vente forcée, le remboursement de l’hypothèque prime sur son droit d’usufruit. Il est peu probable qu’une banqwue soit d’accord de verser des fonds sans cette condition. A ces conditions, cela devrait fonctionner.

      Bien entendu votre grand-mère doit disposer de la capacité de discernement pour cette opération.

      Je vous souhaite bonne chance.

    2. Bonjour Monsieur,
      Je crée ce genre de tableau à chaque fois que j’en ai l’utilité. Mais cela fait partie de l’exercice de créer votre propre tableau. Vous allez mettre de grosses sommes en jeux avec de lourdes responsabilités pour vous et de nombreuses autres personnes. Vous pourriez perdre les mêmes montants que ce que vous pourriez potentiellement gagner. Il vaut donc mieux que chaque formule de votre tableau soit juste et bien pensée tout en étant totalement adapté à cette situation spécifique.
      En résumé, vous seul pouvez faire votre tableau.
      Bonne chance,

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